Tsai Ing-wen, la petite femme de 67 ans, à l’allure discrète d’une première de la classe, va quitter la scène politique le 20 mai, avec un taux de popularité élevé (58 % des Taïwanais approuvent son action), bien supérieur à celui de son parti, le Parti démocrate progressiste (DPP). Formée dans les meilleures universités de Taïwan, des Etats-Unis et du Royaume-Uni, elle est considérée par certains comme la plus grande présidente de l’histoire contemporaine de l’île.
Depuis l’arrivée au pouvoir de la dirigeante, en 2016, Taïwan s’est imposé de manière impressionnante dans au moins trois secteurs : la géopolitique internationale, les technologies les plus avancées, et le respect des droits humains.
L’île que la Chine considère comme une province rebelle qui devra tôt ou tard être « réunifiée », est longtemps restée un paria de la communauté internationale. Mais Taïwan a renforcé son identité propre en s’émancipant de son lourd héritage chinois, et est désormais cité en exemple pour ses nombreuses réussites : sa gestion de la crise du Covid-19, sa transition démocratique, sa stabilité au cœur de la relation houleuse entre la Chine et les Etats-Unis, et son stoïcisme face aux déclarations hostiles du président Xi Jinping et aux provocations de l’armée chinoise.
L’un des derniers engagements publics de Tsai Ing-wen, quelques jours avant son départ, a été d’accueillir la célèbre drag-queen américano-taïwanaise, Nymphia Wind, pour la féliciter d’avoir gagné le « RuPaul’s Drag Race », un concours télévisé très populaire.
« Vous êtes devenue notre mère taïwanaise »
La drag-queen, juchée sur de hauts talons à paillettes, portait un extravagant costume jaune poussin, en contraste avec la tenue monacale de Tsai Ing-wen – ample veste grise sur pantalon noir et chaussures souples. « Vous êtes devenue notre mère taïwanaise. Merci pour toutes les avancées que vous avez réalisées : première femme présidente, première autorisation du mariage gay, première performance de drag-queen dans un palais présidentiel… », a déclaré la Nymphia Wind, émue aux larmes, à l’issue d’une performance spectaculaire sous le regard impassible de Sun Yat-sen, le fondateur du Kouomintang, le parti nationaliste chinois et de la République de Chine, qui reste le nom officiel de Taïwan.
Outre la nomination ministérielle, dès 2016, d’Audrey Tang, gourou de l’informatique qui se décrit comme post-genre, c’est incontestablement la légalisation du mariage gay, en 2019, qui restera le marqueur le plus fort de la mutation de Taïwan vers une société officiellement progressiste.
Il vous reste 67.73% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.