Mahaut Drama est aux Petits tonneaux comme chez elle. C’est dans ce troquet de quartier que l’humoriste donnait rendez-vous à ses proches et à son public après chaque représentation, quand elle a commencé à jouer son seule-en-scène, Drama queen, en 2022, à l’Apollo Théâtre (Paris, 11e) juste en face. Elle ne compte pas le nombre de fois où elle y a « dansé, trinqué, embrassé », portée par l’euphorie liée au spectacle, et par une passion pour la fête qui ne l’a pas quittée, la trentaine tout juste franchie.
Derrière le zinc, où elle commande un Coca entre deux de nos questions, trônent encore quelques-unes des couronnes de papier avec lesquelles elle a l’habitude d’adouber les spectatrices – bien plus nombreuses que les spectateurs – à la fin de son show. Par ce geste, elle leur enjoint de prendre leur place de « queen », elles aussi. « C’est une sorte de thérapie de groupe », s’amuse Mahaut.
Après son succès à l’Apollo et son entrée en 2023 dans l’équipe d’humoristes de France Inter et de « Quotidien » (Canal+), Mahaut Drama a fait salle comble toute la saison à La Nouvelle Seine (Paris, 5e), théâtre-péniche qui s’emploie à révéler de nouveaux visages de l’humour. Elle entame à présent une tournée hexagonale. Avant un retour à Paris, à la rentrée, dans la grande salle de l’Européen (17e) : une étape franchie pour cette voix qui résonne singulièrement au sein d’un milieu du stand-up encore très masculin. Et, plus généralement, un signe de la percée d’une nouvelle génération d’humoristes, plus féminine, plus queer, dont font partie ses acolytes Tahnee, Lou Trotignon ou Noam Sinseau.
Cette bande solidaire de jeunes talents porte une parole qui tranche avec celles qui prévalaient jusque-là dans les comedy clubs. « Ça n’intéressera personne », avaient d’ailleurs rétorqué à Mahaut de multiples producteurs et programmateurs de salles, quand elle rodait, quatre ans plus tôt, ses sketchs où se croisent féminisme, genre, santé mentale, addictions ou encore grossophobie. Elle a surtout vite compris que « ça » dérangeait.
« La fête m’a sauvée »
Justement, Mahaut cultive le dérangement. Elle s’y engouffre avec délectation, travaillant son attitude de « bad bitch », mi-bimbo, mi-intello. Elle l’injecte dans son personnage de scène, une reine du drama en crop top, paillettes et maquillage appuyé. Une posture de provocation autant qu’une manière de reprendre possession de son corps et de ce qu’elle veut en célébrer, le tout porté par un discours féministe non timoré. Très volubile, celle qui a fait des études en sciences politiques et en journalisme mâtine ses blagues de chiffres et d’études sur les violences faites aux femmes ou les neurosciences – son « petit côté conf’ ».
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