Le 77ème Festival de Cannes ouvre ses portes ce mardi accompagné par les rumeurs de nouveaux scandales #MeToo.
C’est l’un des nombreux sujets d’actualité brûlants qui devraient traverser la quinzaine, des salles obscures au tapis rouge.
Reste que Cannes, c’est aussi une sélection de films plutôt alléchants, un an après le sacre de Justine Triet avec « Anatomie d’une chute ».
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Festival de Cannes
Depuis une semaine, la presse ne parle que de ça : la parution imminente d’une enquête dénonçant des grands noms du cinéma français coupables de violences sexistes et/ou sexuelles. Certains seraient même attendus sur le tapis rouge du 77ème Festival de Cannes et leurs équipes aux abois, en plein #MeToo du cinéma français suite à l’affaire Depardieu et aux accusations de Judith Godrèche contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon.
Info ou intox ? Toujours est-il que dans un entretien accordé à Paris Match il y a quelques jours, la présidente de la manifestation Iris Knobloch a annoncé surveiller la situation de « très près » et envisager des mesures « au cas par cas » si un scandale devait éclater durant la quinzaine qui s’ouvre ce mardi 14 mai avec la projection du nouveau film de Quentin Dupieux, Le Deuxième Acte, et une Palme d’or qui sera remise à la légendaire Meryl Streep.
L’actualité partout, des films au tapis rouge
L’an dernier, le Festival de Cannes avait été épinglé par les mouvements féministes et une pétition de comédiens français avait été lancée en raison de l’invitation de Johnny Depp, quelques mois après sa bataille judiciaire mouvementée avec Amber Heard. Cette nouvelle rumeur sur le cinéma français est-elle de nature à envenimer l’atmosphère ? « Ce qui va envenimer l’atmosphère, c’est le fait qu’on en parle !« , a rétorqué ce lundi le délégué Thierry Frémaux lors d’une rencontre avec la presse.
« L’un de vos collègues m’a demandé ce qui avait le plus changé au cours des 20 dernières années« , a poursuivi celui qui est en poste depuis 2007. « J’ai répondu vos questions ! Parce qu’avant, on ne parlait que de cinéma. Quand le festival commençait, nous n’avions, nous les organisateurs, qu’une seule angoisse : les films. Vont-ils être aimés ? Vont-ils être détestés. Quel sera le palmarès ? On ne parle plus du tout de ça. »
Reste que l’actualité rattrape déjà le festival le plus médiatisé de la planète. Alors que Judith Godrèche est attendue sur la Croisette pour présenter Moi Aussi, un court-métrage qui réunit mille victimes de violences sexuelles, l’actrice et réalisatrice a participé ce lundi à Paris à une manifestation réclamant le retrait de Dominique Boutonnat, le patron du Centre National de la Cinématographie (CNC), qui doit être jugé pour agression sexuelle en juin prochain.
Cannes, c’est aussi la menace d’une grève que font peser sur la manifestation les salariés précaires du collectif « Sous les écrans de la dèche », fragilisés par la réforme de l’assurance chômage. « Aucun festival ne peut se faire sans la participation de jeunes travailleurs qui viennent faire des contrats courts« , a plaidé Thierry Frémaux, sans pour autant garantir que leurs revendications n’impacteront pas les festivités. Enfin, alors que les deux précédentes éditions ont été marquées par des happenings en soutien à l’Ukraine, difficile de ne pas imaginer le conflit à Gaza s’inviter sur les marches.
Un géant, des dissidents… et des jeunes pousses
D’ici là, la planète ciné a rendez-vous avec une sélection pour le moins alléchante. On pense au comeback de l’immense Francis Ford Coppola avec Megalopolis, un projet fou porté par Adam Driver et une pluie de stars. Aux retrouvailles du réalisateur grec Yorgos Lanthimos et de sa muse Emma Stone avec Kinds of Kindness, quelques mois à peine après le sacre de la comédienne aux Oscars pour Pauvres Créatures. Ou encore à The Apprentice de Ali Abbasi, brûlot annoncé sur la jeunesse dorée de Donald Trump avec Sebastien Stan dans le rôle de l’ancien président, actuellement en procès à New York.
Très politique sur le papier, la compétition cannoise devrait également être marquée par Limonov : The Ballad of Eddie, l’adaptation du roman d’Emmanuel Carrère sur le dissident russe du même nom par Kirill Serebrennikov, lui-même en exil depuis l’invasion de l’Ukraine. Mais aussi par la présence de Mohammad Rasoulof, le cinéaste iranien qui vient d’annoncer avoir fui son pays après avoir été condamné à cinq ans de prison par le régime de Téhéran. Tourné dans la clandestinité, son nouveau film intitulé The Seed of The Sacred Fig sera présenté le 24 mai prochain, à la veille du palmarès du jury présidé par Greta Gerwig, la réalisatrice de Barbie. Un sacré choc des cultures en perspective.
Et le cinéma français dans tout ça ? Après le sacre de Justine Triet avec Anatomie d’une chute l’an dernier, tous les regards seront braqués vers Jacques Audiard et son Emilia Perez, une ambitieuse comédie musicale dans laquelle la star d’Avatar Zoe Saldana incarne l’avocate d’un narcotrafiquant qui rêve de se retirer des affaires… en devenant une femme. Cinq ans après Le Grand Bain, Gilles Lellouche a lui aussi choisi le registre de la comédie musicale avec L’Amour Ouf, une romance à très gros budget interprétée par François Civil et Adèle Exarchopoulos.
Sur les quatre réalisatrices en lice pour la Palme cette année, deux sont Françaises. Coralie Fargeat avec The Substance, un « body horror movie » à la Titane porté par Demi Moore et Margaret Qualley. Et la jeune Agathe Riedinger, une parfaite inconnue dont le Diamant Brut dresse le portrait d’une gamine de Fréjus bien décidée à devenir la Kim Kardashian française. Ce premier film a tellement plus aux équipes du Festival qu’elles l’ont envoyé tout droit en compétition face aux poids lourds du Septième art. Le genre de belle histoire qui ferait (presque) oublier les polémiques.